Avril 2022

01/04/2022

Rick Miller
Old Souls
progressive rock atmosphérique/melancholy rock – 52:00 – Canada ‘22
Rick Miller débute en 1984 sa recherche musicale, enfilant les albums pour en arriver à son 16e en ce début d’année. Rick s’éloigne de plus en plus de ses idoles que sont Pink Floyd et Genesis avec leur guitariste Steve Hackett pour proposer un son au caractère affiné. Du rock atmosphérique sombre, mélancolique, limite new age pour un retour à ses amours d’origine; bref du vrai rock progressif sans fioritures avec ses breaks pour faire fondre le plus fort des Améridiens.
Au niveau des titres «Time's Way» pour le rock mélodique à la Alan Parsons Project et un superbe solo guitare. «Haunt Me» rien que pour l’intro travaillée, nostalgique, invitant à la méditation. «Virgin Rebirth» pour son intro vrombissante, le violon majestueux de Kane puis le synthé coloré; le final planant en decrescendo sur un roulis de vagues prolonge avec «The Red Sky» le cello de Mateusz emmenant sur des terres arides où la dépression devient beauté. «A Stitch in Time» avec une connotation persane où les flûtes de Sarah et Jaye font merveille. «Don Quixote» pour le titre fleuve qui part sur des variations stratosphériques après une entame convenue; un break symbolise le bruit des ailes du moulin du héros du titre; le final sur Pink Floyd et guitare acoustique.
Rick Miller sort des albums de façon frénétique. Il a un atout avec ses compositions millimétrées pour vous faire fondre. Il produit un album consensuel au départ qui se magnifie au fil des écoutes, proposant un son rock pop planant et langoureux. Pour ceux qui ne connaissent pas encore c’est juste dantesque dans le genre; pour les autres un bon album un peu plus diversifié que les deux derniers. Bref ça peut paraître bis repetita mais c’est super bien fait.
Brutus

https://rickmiller.bandcamp.com/album/old-souls

https://www.youtube.com/watch?v=S2xIQF0HS5s

02/04/2022

Avian3
Cassiopeia
ambiant/e-music – 76:25 – Belgique ‘22
Le vaisseau Avian revient aux confins de la Terre comme porté par les douces ailes translucides d’un agrion solitaire. Un long panel de sept franges planant sur les vagues de la musique électronique universelle parfois imprégnée de l’aura d’un Schulze rendu clément par des séquenceurs devenus l’apanage de petits lutins cosmiques s’activant dans la carlingue de l’immensité du vaisseau spatial.
Comme dans un demi-sommeil opalescent, entre deux états où la réalité se confond d’onirisme, cette musique nuageuse semble évoluer dans une temporalité incertaine. Claviers aux nappes doucereuses qui ne font que passer, pour ne pas inquiéter l’astre visité, ou effaroucher les quelques curieux effleurés par le sillage de l’instrument ailé.
Belles sonorités, riches de délicatesse, nous plongeant de plus en plus dans le tréfonds d’un lent vortex répétitif. Entité insolite rappelant les membranes gélatineuses d’une méduse voguant avec délicatesse à la lisière de l’humanité.
Avian nous visite pour ensuite repartir à l'extrémité de notre univers et nous laisser le souvenir d’une expérience étrange.
Centurion
https://eljiceavian.bandcamp.com/album/cassiopeia

https://www.youtube.com/watch?v=Qi44n9Awidw

03/04/2022

It will last
Nightmares in Daylight
progressive metal – 56:52 – Italie ‘21
Premier opus pour nos amis lombards de It Will Last. Le groupe est en réalité un duo composé de Simone Carnaghi aux guitare, basse et batterie et le chant est laissé à Daniel Reda. En 2018, ils ont partagé leur passion pour la musique et se sont lancés ensemble dans cette aventure. Musicalement, on ressent fortement le goût de Simone pour le heavy des années 80, mais l'ensemble reste relativement classique dans ce registre. La guitare est omniprésente et sa basse est très agréable à ressentir. Malheureusement, quand on veut faire du métal progressif sans clavier et avec un seul guitariste on se met des limites dans la composition. Daniel chante très bien, même s’il a tendance à en faire trop, surtout en chant heavy classique, ce qui le dessert fortement. Je le verrais mieux chanter dans sa langue natale... Le son est bon mais on ressent le côté fait maison dans certains détails de mixage. On peut retrouver cette remarque régulièrement pour des groupes de studios. Parmi les influences, on retrouve naturellement Rhapsody of Fire (sans claviers), surtout dans des parties chant, je pense notamment à «The Winner»; je retrouve également un penchant vers Blind Guardian. Dans leur présentation, ils disent être inspirés par Iron Maiden de la première période, mais je ne suis pas trop d'accord. Comment peut-on vouloir faire Maiden avec une seule guitare...? It Will Last n'a pas à rougir de son premier opus, «Nightmares in Daylight», qui est agréable à écouter; ils ont l'avenir devant eux pour nous proposer d'autres opus moins classiques et plus recherchés.
Vespasien
https://open.spotify.com/album/19YDEXRixiF1wOylxe8VwL

https://www.youtube.com/watch?v=mYH3px3Zet8

04/04/2022

Grandval
Eau/Feu
pop prog sophistiquée – 45:52 – France ‘22
Quand un guide, que dis-je, un leader comme Christian Décamps décrit votre dernier album en des termes aussi élogieux qu’«œuvre magistrale d’un grand chef», on ne peut que s’incliner devant un avis aussi autorisé en la matière; après tout c’est au Décamps-gourou en chef que le prog’ à la française doit presque tout! Seulement, c’est de l’opus précédent que parlait le chanteur d’Ange, le très réussi «Descendu sur Terre», chroniqué dans Prog censor le 15 mai 2021. En 2022, toujours emmené par son sémillant leader Henri Vaugrand et son complice Olivier Bonneau, Grandval remet le couvert avec «Eau/Feu» et là, petit changement de direction musicale pour le groupe auvergnat qui opte consciemment vers une optique plus pop que ses deux disques antécédents. Un chemin de traverse emprunté avec le plus grand soin dans la qualité et le travail de production, on ne peut que le remarquer d’emblée. Mais s’il reste de réjouissants instants délectables se rapprochant plus du rock progressif entendu dans les travaux antérieurs, Grandval séduira un autre public plus enclin au clinquant d’une certaine chanson française inspirée; j’en veux pour preuve cette reprise précurseur de Christophe «J’aime l’ennui», sortie impromptue en novembre 2021 que j’aurais aimé voir figurer au sein de l’opus (je vous invite à la chercher sur YouTube). Si vous avez écouté ce cover admirable, vous devinez déjà vers quel horizon Vaugrand, Bonneau & Co se sont orientés pour leur troisième rondelle. Cette fois, les deux amis ont travaillé en vrai binôme, incluant O. Bonneau qui a composé deux morceaux et H. Vaugrand qui s’est chargé, comme d’habitude, de tous les textes. On retrouve également un homme lige du prog’ français avec la présence, là aussi habituelle, de Jean-Pierre Louveton (alias JPL) et Jean-Baptiste Itier (batterie) accompagnés d’Élodie Saugues pour des harmonies vocales saupoudrées çà et là. La voix douce et parfois fragile de l’ami Vaugrand s’entrelace avec bonheur au sein de mélodies nombreuses à savourer et ma foi, on croit entendre W. Sheller sur l’envoûtant «Il neige encore», c’en est bluffant! Si c’est là où la bande à Bonneau et Vaugrand veut nous emmener, il ensorcellera de nouveaux admirateurs d’une pop indie vaporeuse et languide. Cette chanson est tout simplement excellente. D’ailleurs, il flotte une bienheureuse nonchalance parfois «floydienne» comme sur «Fin de partie» qui clôt l’album. Il semble évident que Grandval a pris une nouvelle direction qui ne sera pas pour déplaire aux aficionados des «À ciel ouvert» et «Descendu sur Terre» mais en manipulant à son avantage une forme de modernité musicale, tout en gardant cette part de magie inhérente au charme lumineux de la formation auvergnate qui retrouve un pur élan progressif au sein de «Heinrich (un monde bien étrange)» ou encore «Les jours innocents» et son final incandescent. La pochette est aussi signé d’Henri Vaugrand qui décidément, peint, chante, joue de la basse et de la guitare, écrit et chronique avec la même aisance volubile. Je pense que Christian Décamps se régalera encore cette fois...
Commode
https://grandval.bandcamp.com/album/eau-feu

https://www.youtube.com/watch?v=9TDwxh-y_LQ

05/04/2022

The Moose
Spature
psychedelic rock – 116:05 – États-Unis ‘21
Ces gars (enfin, ces trois filles et deux garçons) de Kansas City (Missouri) nous présentent un menu plus que fourni (près de deux heures de musique, on dépasse la norme d’un double LP), avec 26 chansons psychédéliques altières («Century of Illusion Men»), spatiales («Squid»), grandioses (la suite «Mother Tree/Muddy Tree/Shelter's Chorus» se démarque) ou simples interludes («Satyr of Swordbend»). Même si de temps à autre une étincelle pointe le bout de son nez (l’intro de «A Robin's Egg», le sitar de «Sitar Centaur», les notes de clavier étirées de «Lost Lake»), The Moose peine à transformer l’essai et patauge le plus souvent dans une mixture qui trouble bien moins l’auditeur que ce qu’une musique née dans l’acide et la psilocybine est censée faire, et se fait plus souvent insignifiante («Galactic Cold»), voire dispensable («A Grog Blossom's Tale»): c’est le risque d’un menu copieux, à force, on perd les saveurs dans une abondance lassante – que ne corrige pas une production qui, sur l’essentiel du disque («Grasswalkin’» est l’exception), maintient les sons dans une uniformité fade.
Auguste
https://themoose.bandcamp.com/album/spature

https://www.youtube.com/watch?v=AsybB3lgws4

06/04/2022

Marillion
An Hour Before It’s Dark
progressive rock – 54:11 – UK ‘22
2022 sera une année particulière pour le prog. Nous recevrons en offrande une nouvelle production des trois groupes majeurs ayant ressuscité le prog à la charnière des années 90 (Flower Kings, Porcupine Tree et normalement Spock’s Beard) mais, surtout, le chef de file du néo-prog des années 80 se rappelle au bon souvenir de toute la planète prog.
Marillion est un groupe à la carrière exemplaire. Dès 1994, ils n’ont pas hésité à bousculer leurs fans en sortant coup sur coup «Brave» et «Afraid of Sunlight» qui les écartaient radicalement de leurs débuts. Ils ont même malmené leurs fans avec «Radiation» et, dans une moindre mesure, «Anoraknophobia». Ils ont surtout conquis leur indépendance du business en fondant leur propre label et en institutionnalisant ce qu’on n’appelait pas encore le crowd funding, parvenant même à faire financer une tournée aux USA par leurs fans en 1997. Ce parcours d’une intégrité artistique à toute épreuve leur vaut de toujours bénéficier d’une aura intacte et d’une fan-base considérable prête à les suivre dans leurs aventures.
Voici donc leur 20e album studio (plus exactement le 18e de compositions originales) qui sort après deux ans de pandémie et dans une période chahutée. Le groupe abordait les sujets politiques dès son premier album avec «Forgotten Sons», mais on peut difficilement le qualifier de militant. Souvenons-nous que «King of Sunset Town» (sur «Seasons End» en 1989) évoquait de manière allégorique les événements de la place Tian'anmen.
Dans les derniers albums, on sent toutefois poindre une urgence qu’on ne leur connaissait pas; un peu comme si la prise de conscience de la fin approchante de leur carrière les poussait à prendre position. Un morceau comme «Gaza» (sur «Sounds That Can’t Be Made») était clairement politique, tout comme l’intégralité du concept de «FEAR», leur précédente production. Ce qui frappe avec cette livraison est sa parfaite résonance avec le temps du moment, à travers une observation à la fois cruelle et humaniste de la période que nous venons de vivre. Le titre fait non seulement référence à l’heure qu’il reste avant la nuit mais aussi au temps qu’il nous reste pour sauver notre planète du désastre qui l’attend. Comme un sage qui sait qu’il ne lui reste plus longtemps à vivre, ils interpellent l’auditeur mais aussi l’émeuvent en projetant des tonnes d’émotion à fleur de peau.
Plus encore que le précédent, cet album s’écoute mais aussi se lit car Steve Hogarth a soigné son écriture impressionniste pour essayer de nous toucher au plus profond. Le single «Murder Machines» est à ce sujet un monument d’émotion; nous sommes ces machines de meurtre en communiquant malgré nous ce sacré virus à nos proches. Le propos est glaçant mais la musique est brillante et fait l’effet d’un obus qui transperce le cœur de part en part avec un chorus vous soulevant d’émotions. «Reprogram the Gene» nous interpelle sur les dégâts que l’homme inflige à l’environnement, mais le sommet de l’album est atteint avec «Care» qui rend un hommage poignant aux soignants qui se sont dédicacés sans failles pendant ces deux années de pandémie. Au long du morceau, la phrase «the angels of this world are not on the wall of churches» résonne au plus profond et les notes finales nous laissent suspendus comme à un fil, la joue touchée par une douce caresse remplie de compassion.
Inutile de parler ici du travail des membres du groupe, ils sont au sommet de leur art et leur alchimie ne semble jamais avoir été aussi forte.
Un tout grand album d’un tout grand groupe.
Amelius

https://open.spotify.com/album/2n8ZvHYsRU4EXJpqyhtv7Q

https://www.youtube.com/watch?v=RA7Dl7TTrOQ

07/04/2022

ZoneM
Sono dentro di me
rock progressif italien noir – 59:32 – Italie ‘22
ZoneM est un projet de Beppi Menozzi, le clavier des Génois de Jus Primae Noctis. Tant ce qu'il écrit dans le livret d'accompagnement est EXACTEMENT ce que j'ai ressenti, je lui laisse (un peu) la présentation du disque: «À l'humain qui a ce livret à la main. Cet opéra ne vous fera pas danser, ni tomber amoureux. Il contournera vos contrôles rationnels, pour atteindre le noyau de votre cerveau, car ce n'est pas que de la musique. Caché sous les notes d'un instrument innocent, il suggérera des sons naturels imprimés dans votre subconscient depuis des temps immémoriaux. Des sons qui ont sauvé la vie de vos ancêtres. Bruits inattendus, dissonances, vous conduiront à synchroniser votre rythme cardiaque et à l'accélérer. Il essaiera par tous les moyens d'induire l'anxiété, la peur, la tristesse, l'angoisse. Des émotions archaïques, auxquelles vous ne pourrez échapper.»
Fabriqué en plein Covid, je le découvre pendant la Poutinite. Ton sur ton. CoronaviRusse 22.
Le gratin des musiciens génois est venu pour participer à ce film d'épouvante jamais tourné. Peu de place à l'allégresse si coutumière des productions italiennes, ici c'est le côté Goblin dont sont hérités ces climats noirs et anxiogènes. Les amateurs du genre adoreront. Pour les autres, c'est un album qui donne à profusion ce qu'il promet au moyen de basses telluriques, de rythmes lourds et brassants, de voix superposées et détunées, d'orgues dissonants et de guitares assassines. Un très intéressant florilège qui va du rock caverneux, au gothic mélodieux (la présence de Diego Banchero/Il Segno del Commando?), en passant par le cinematic et le prog rock. L'essayer c'est se soumettre à la vibration primaire de notre cerveau reptilien. Cœurs sensibles, gardez la touche pause à portée de doigt, et écoutez-le dans une pièce bien éclairée.
Prog censor décline toute responsabilité!
Cicero 3.14

https://open.spotify.com/album/5rML3w10USAcVpZU8GxI5N

https://www.youtube.com/watch?v=59l4NO_Pw9c&list=PLGJOj3ejyhJyUK9xVg0KnE22r2sdifSqe&index=6

08/04/2022

Time Horizon
Power Of Three
neoprog – 44:15 – USA ‘22
Time Horizon est un groupe américain provenant des Iron Clay Potes, influencé par le rock symphonique de Yes, Genesis, King Crimson, Emerson Lake and Palmer, Kansas et Pink Floyd. Un son raffiné, mélodique, avec des plages instrumentales sur de l’art rock de fait. Ce 3e album m’a heurté en voyant Michael Sadler au chant. L’album entier est un voyage musical pour l’auditeur en alliant des ambiances assez disparates.
Au niveau des titres, le hit-tube «Living for a Better Day» avec la voix remarquée de Michael Sadler, des synthés en avant et le solo guitare nerveux et envoûtant. «I Hear I See» avec entame a capella charmante, titre plus mélodique; le néo pour la variété des sons derrière la voix de David; un peu d’Arena, de Tears For Fears et de Toto. «Prelude» pour l’intro instrumentale néo-prog avec batterie, chœurs, synthés et Hammond. «The Razor's Edge» sur de l’AOR sans concession; des synthés à la Mike + The Mechanics et une variation Yes-Genesis des 90’s. «Steve's Song»: intro Saga langoureuse, Michael à la basse emmène cet instrumental rappelant Serra; les voix à la 10CC vous achèvent. «The Great Divide» qui fleure bon le Toto puis le Kansas et un final à la Alan Parsons. «Digital Us» ressemblance avec Rush, rock trempé et un effet sonore derrière à la Pink Floyd des «Animals».
Time Horizon sort un crossover album entre rock progressif et rock mélodique sans temps de repos; nerveux, claviers omniprésents, un son typique des 80’s remodelé, bon et prévisible. Une musique amenée avec des musiciens au fait de leurs gammes. Les sons diffèrent et se ressemblent, s’enchevêtrent pour donner un album bien monté qui surfe au niveau des réminiscences et fait actuel, un réel plaisir. Time Horizon est partisan de LWI, organisation noble aidant à donner l’eau aux plus pauvres. David, Ralph, Bruce, Allen White, Dave et Michael sont bien au-delà de la musique.
Brutus

https://timehorizon.bandcamp.com/album/power-of-three

https://www.youtube.com/channel/UCxbuuew_VT6wBNH0rmWj1yw

09/04/2022

Arnaud Quevedo & Friends
Roan
zeuhl – 54:18 – France ‘21
Comme activité principale, Arnaud Quevedo est enseignant en Musiques Actuelles au Conservatoire de La Rochelle. Passionné de groupes auxquels il rend hommage, accompagné de certains de ses élèves (le tout visible sur sa chaîne YouTube), comme Magma, King Crimson, Gong ou Frank Zappa, il nous revient ici pour son troisième album (quatrième si l’on compte le live l’année dernière) accompagné de douze musiciens dont une merveilleuse chanteuse en la personne d’Emeline Merlande, mais il est évident que tous ces intervenants sont d’un très haut niveau technique. Arnaud lui-même s’occupe de la guitare, des synthés et du chant. Il serait fastidieux de détailler ici tous les intervenants à ce projet, je m’en abstiens donc. Il n’y a guère de traces de qualité des projets auxquels notre homme a participé dans le passé, hormis deux participations en tant que bassiste aux DVD de la chanteuse française Robert (concerts de la Cigale en 2005 et à l’Olympia en 2010).
Mais venons-en, si vous le permettez, à la musique. Une musique céleste, à tendance tzigane, mais très courte, introduit cette galette («Aube»). L’univers de Magma nous envahit ensuite («Prologue»): quelle différence pour ce titre de grande qualité. Ambiance complètement différente, presque onirique pour «Découverte» où l’on découvre (c’est le cas de le dire), après plus de trois minutes, la voix enchanteresse d’Emeline. Les interventions à la flûte ne peuvent que charmer nos oreilles. Plus loin, «Dépassement» nous emmène, d’une certaine manière, dans un univers proche de Disney ou de fêtes foraines, ce qui n’est pas désagréable, loin de là!
Mais venons-en, si vous le voulez bien, à la pièce de résistance (plus de douze minutes): «Ryoko» qui mélange allégrement des ambiances jazzy, de la musique de chambre et du chant à la Magma. Lorsque le papillon sort de sa «Chrysalide», c’est encore plus beau: quelle «Métamorphose»!
Quittons cette superbe plaque sur un «Epilogue» enjoué et virevoltant!
Tibère
https://arnaudquevedo.bandcamp.com/album/roan

https://www.youtube.com/user/DarthNohks/featured

10/04/2022

Khadavra
Hologram
psychedelic rock/rock progressif – 74:04 – Suède ‘21
Khadavra dresse avec cet opus un oxymore musical parfait, mélange de lumière sombre, d’obscurité chaleureuse, une hyperbole musicale imprégnée de sons, d’émotions, de divagations influant sur nos associations mentales; plus que du psyché, on semble rentrer ici dans un état musical hypnotique et ce ne sont pas les instruments classiques tels le cor, marimba, sitar qui vont vous faire changer d’avis.
Le sens du style progressif est ici développé dans ce qu’il a de plus beau, de plus imaginatif.
Richesse d’influences, Floyd côtoie Tool en passant par Anekdoten et Camel. La richesse du rock progressif des années 70 et la modernité de ce premier quart de siècle.
Cet opus m’a fait voyager, rêver.
Je n’ai aucun titre à vous conseiller d’écouter en priorité, cet «Hologram» se découvre dans sa globalité, il vous demande un lâcher-prise d’un peu moins de 80 minutes, mais vous en ressortirez comblé.
Tiro
https://khadavra.bandcamp.com/album/hologram

https://www.youtube.com/watch?v=IbrGN34tplg

11/04/2022

The Osiris Club
The Green Chapel
progressive rock – 44:16 – UK ‘21
Fondé en 2010, à Londres, The Osiris Club nous livre son troisième album, pochette style Lapins Art Composite-monde de Sophie, en pleine nature moyenâgeuse: «The Green Chapel»! Qu’avons-nous là? Influences fin des années 1970/début 1980, après le Punk/la Cold Wave, le résultat est sec, froid et étouffé. Si je ne peux nier l’inventivité des compos, je n’ai pas été séduit par l’univers (il est pourtant question de mythes, de légendes et de fantômes, tout un programme!), j’ai senti comme un voile, un interférence, une turbulence entre lui et mon âme curieuse (à l’usure) désenchantée… J’attendais du feeling, de l’émotion ou de la fièvre, j’ai parfois eu de la peine à ressentir quoi que ce soit. Et pourtant, les musiciens ne sont pas à blâmer: bonne gratte riffeuse, chouette batterie emballés et sympatoches claviers en toile de fonds. À dire vrai, j’ai moins d’éloges sur le micro… Ian Curtis et Bernard Summer sont visiblement passés par ici. La voix est, bien trop souvent, effacée, comme aspirée… fade, un écho, un halo…Dès «The Fantasm» jusqu’à «The Crow» en passant par «Moscow», un frontman en presque backman. Loin de moi l’idée d’être sournois, plusieurs morceaux sont à l’évidence réussis. «Diamonds in the Wishing Well», tout de saxo traversé, donnera à merveille en festival, en rappel ou juste avant la mi-temps, un bon punch s’en dégage; «Count Magnus» est un bon rock, cuivre et guitare, mieux chanté que ses petits frères; «The Crow» arrive tout de même à nous faire vibrer comme il faut; en quatre parties, la chanson «The Green Chapel» a une poignée de raisons de laisser son nom à l’album, tant l’effort de variété est patent, bien que le tout feu pas tout flamme quadriptyque crépite de quelques lourdeurs; point d’orgue en partie III: «Winter's End». Les accords de guitares sont rageux-teigneux. Finalement, il fait assez chaud au point culminant du froid… Après tout ça, je suis quand même allé pousser une pointe vers les précédents opus: «Blazing-Word» (2014) et «The Wine-Dark Sea» (2018)... J’y ai trouvé la même came d’un bout à l’autre. Il y a certainement un public, j’ai pu lire de bonne choses sur le net, par ici et par là, pour l’heure, je n’en fais pas partie…
Kaillus Gracchus
https://theosirisclub.bandcamp.com/album/the-green-chapel

https://www.youtube.com/watch?v=_89Ps4HHx2Y

12/04/2022

Trees Speak
PostHuman
krautrock électro – 39:52 – États-Unis ‘21
Trees Speak, duo prolifique de Tucson (Arizona), boucle avec «PostHuman» un troisième album sur une douzaine de mois, d’une musique qui tente l’alliance, assez germanique, entre des inspirations planantes ancrées dans l’école berlinoise des Tangerine Dream et autres Klaus Schultz, et des procédés percussifs (les motoriques «Glass», «X Zeit» ou «Double Slit» évoquent Neu!), synthétiques ou non («Elements of Matter»), qui font pencher le métronome du côté des Can et autres La Düsseldorf – avec des morceaux synthèses comme «Scheinwelt» qui puisent indifféremment aux deux mamelles de ce tournant de la musique de la fin ‘60, début ’70. Daniel Martin Diaz et Damian Diaz cultivent une imagerie rétro-futuriste de science-fiction qui rejoint l’angle musique de film de morceaux comme «Quantize Humanize» (au Vocoder opalescent) et qu’ils enrichissent ponctuellement de timbres analogiques (le saxophone de «Chamber of Frequencies»).
Auguste
https://open.spotify.com/album/4U4RPgFbFdcDkVAENicVWO

https://www.youtube.com/watch?v=rpK0TX8MYxI

13/04/2022

Arctic Plant
A Wandering Mind
progressive rock/rock symphonique/heavy prog – 48:43 – Allemagne ‘21
Arctic Plant est le projet solo de Phil Rexilius, maestro musical créatif d’albums concepts depuis 2013; il jouait auparavant comme batteur de hard tout en écoutant King Crimson, Yes et Camel, un indice. Autodidacte, il se lance dans son 3e album basé sur l’histoire d’un homme errant dans la forêt, et les arrangements orchestraux partent sur l’épique comme le fait Neal Morse, son mentor. Il se revendique créateur d’émotion musicale pour engendrer désir et joie onirique. À noter qu’il a enregistré toutes les voix dans sa voiture.
«The Quest Pt. 1: Desire» entame symphonique, guitare floydienne caractéristique; vocal en arrière-plan, comptine progressive rien que dans la trame, amenant «The Forest» pour une intro sympho-métal dans la lignée d’un Shadow Gallery, cor spleen, guitare vibrante, voix qui revient à l’air du départ; c’est à la fois grandiose et répétitif, le titre que tu te dis mais il fait ce que tu attendais. Douceur, montées symphoniques avec guitare et piano pour un break dithyrambique et un final digne d’un «Mario Bros» pour ne pas se prendre au sérieux. «Brothers and Sisters» déboule sur une rythmique dingue dès le départ, joute jouissive, basse pour se poser, ça repart puis le couplet redondant sur les deux premiers titres, on est bien sur un concept album; break sur un orgue de barbarie puis la folie des notes furieuses avec un crescendo en deux phases; encore un titre fabuleux, symphonique, majestueux au final à couper le souffle, déluge d’instruments à n’en plus finir; enchaînement avec «The Quest Pt. 2: Contemplation» bien nommé pour se poser après ce voyage musical dans l’au-delà, interlude sidéral.
«Twist of Fate» pour la pièce symphonique comme le «Six Degrees part2» des Dream Theater, cinq minutes d’intro jouissive avec trombone et maestro; la structure couplet est posée, limite phrasé accompagné d’un piano et les Pink Floyd en fond puis les Transatlantic pour la cavalcade musicale; à mi-parcours, la ressemblance d’avec le théâtre des rêves devient flagrante, juste le temps de partir sur un schéma vintage à la Shadow Gallery; la voix devient claire, un piano à la «Silent Hill» et ça repart pour une dernière fournée, embrayant sur «The Quest Pt. 3: Relief» deuxième reposer dans l’album, hymne musical dépressif; ça part sur une fanfare militaire haute en couleur, à en pleurer. Le terminal avec «Perception» et sa petite comptine acoustique montant ensuite pour la fin grandiloquente rêvée, merci Phil!
Philipp Rexilius n’est peut-être pas aussi prodige que son illustre prédécesseur, mais c’est un musicien hors pair qui a sorti un OMNI [objet musical non identifié, ndlr] de fin d’année que je garde jalousement dans mon top 2022. Ah zut, avec cette chronique vous allez vous aussi tomber sous le charme provocateur; tant pis, cet album est juste bouleversant et génial.
Brutus
https://arcticplant.bandcamp.com/album/a-wandering-mind

https://www.youtube.com/watch?v=v6mUhAjYmJA&list=OLAK5uy_nZllBJAy4xiIAujrpNe-5feoY-ew0rREE

14/04/2022

Laughing Stock
Zero, acts 3 & 4
crossover prog – 44:45 – Norvège ‘22
J'avais eu la chance, en juillet 2021, de chroniquer leur 4e album intitulé «Zero acts 1 & 2». L'enfance de Zero (https://www.facebook.com/progcensor/posts/879941229276761). Zero a grandi, nous le suivons; voici les actes 3 & 4, présentés par Havard Enge (voix, clavier, flûte), Jan Mikael Sorensen (voix, guitare, basse, claviers, batterie) et Jan-Erik Kirkevold Nilsen (voix, guitare) comme la conclusion de l'histoire.
«Curtain falls» terminait l'album #1, Zero enfant, presque, sur une note d'optimisme. Presque.
Nous le retrouvons jeune adulte, mais son monde n'est toujours pas plus gai.
«Wingless», 1er des 10 titres, ouvre dans un registre un peu plus post rock que le précédent album, mais toujours avec la même verve. La douce voix d'Harvard et le thème nous prennent bien vite aux tripes, malgré le tempo lent. La rupture de ce thème majestueux génère de la frustration, tant ceci fonctionnait bien. Mais Zero n'est épanoui, pas de raison que le thème le soit!
«Lifeboat»: guitares, sèche et électrique d'abord, nous emmènent ensuite dans un univers éthéré de mellotron façon Crimson et aux sons de vents synthétiques style Eno.
Dans «The Call», plus musclé, plus convenu, intervient Nad Sylvan, pour de belles harmonies vocales entre eux tous. Nad jouant le psy de Zero. Malgré la belle partie orgue/guitare solo, rien ne semble simple pour Zero! «Free»: court morceau plein de ruptures entre rock et introspection.
Les morceaux suivants malgré leurs qualités sont plus pâles que le contrasté «Mother» qui apporte à cette langueur générale une teinte Pink Floyd période psyché en une longue et belle piste de 10 minutes.
Tout l'album est une parfaite illustration du sentiment de solitude dans la froideur du difficile monde moderne. Le mixage confié à l'expérimenté Jacob Holm-Lupo (fondateur de White Willow et participant à quasiment tout ce qui se fait de bon en Norvège) met la touche finale à cet album mélodieux et expressif, meilleur encore que le précédent.
Cicero 3.14
https://laughingstock1.bandcamp.com/album/zero-acts-3-4-2

https://www.youtube.com/watch?v=LEFlpIK7Wi4

15/04/2022

The Green Violinist
Atchafalaya - The Opera
progressive rock – 92’00 – Belgique ‘22
De multiples intuitions auxquelles une actualité troublante vient donner raison, telle pourrait être la froide diagonale venant résumer l’objet qui nous occupe s’il n’était l’étrange fruit d’un infatigable artisan du sens et de la beauté.
Crooneur sapé tantôt de velours souterrain, tantôt de rose-Floyd, chroniqueur de cœur, critique incisif d’une éternelle histoire dont il se plaît à extraire les discours afin d’en souligner sa musique. Le vert violoniste tient la frange toujours bien folk derrière les oreilles, quand bien même son côté «anar» l’oblige à lester un instant ses guitares. Il ose, expérimente, toutes voiles dehors… sans lâcher la barre.
«Un opéra de misère, vous fera grâce de l’enfer où il va tomber à genoux en découvrant le goût de l’absence», je te vole ces mots, William. Car ils sont justes ici. Un travail titanesque que Vincent Defresne (Jean Vincent Defresne) a réalisé autour des deuils, au pluriel, car cette réalité peut avoir de multiples visages (voir interview). Celui du manque définitif d’un autre, d’un amour, d’un rêve, d’un pays, d’une réalité…
Si vous êtes d’une parfaite rectitude, unilatéral, monolithique, passez votre chemin! Pour savourer ce chant d'oiseau, il vous faudra l’esprit courbe. Accepter d’être bousculé, transporté d’un point à un autre. De l’ombre à la lumière.
Un mec libre et génial qui peut s’enorgueillir, même si je doute que ce soit dans sa nature, d’être un artiste qui nous élève, nous accompagne… Prenez de la hauteur!
Néron
Pas de Bandcamp.
Album disponible uniquement via l’adresse: lemeeteux@yahoo.fr

https://www.youtube.com/channel/UCVpLVSPnhn-9pSNbH15kr9A

16/04/2022

Astral Magic
Lords of space
Cosmic Debris (remixes)
spacerock – 50:32/79:54 – Finlande ‘22
DJ Astro, ancien Dark Sun (and the Rising Telepaths), est un musicien finlandais (basse); son groupe a tourné de 1991 à 2007. Il revient sous le nom d’Astral Magic pour un beau résultat psyché space krautrock avec des albums comme «Dreamtime Activities» ou «A Peak into the Future». C’est une galette généreuse une fois encore en chemins de traverse psychédéliques et space à la Hawkwind. Un très bon rock spatial qui vous engage dès les premières notes de «Lords of Space» (Jay Tausig d’Arcana à la guitare). D‘aucuns noteront la présence à la six cordes de Vince Cory (Sonic Trip Project), un habitué du Kozfest et de la scène des festivals psyché (il sera au HRH Psych de Liverpool en Avril) sur «Chakra Vimana». Difficile de s‘ennuyer avec des morceaux roboratifs comme «Head Encounter» et sa rythmique puissante. «The Fall of Atlantis» est bien plus cosmique et apaisante, c’est le genre de trip que j’adore, le tout avec une guitare hurlante et ébouriffante. Un disque vraiment très agréable à écouter et qui me donne encore plus envie de me rendre au Hawkfest en septembre 2022. Plus énergique est «Set on Flames» avec ses claviers lancinants et son rythme trépidant (motorik). Litmus vient à l’esprit. Très équilibré entre space rock, hard rock psychédélique et progressif cosmique avec des morceaux comme «Android Rebellion». Que du bonheur. Un très bon travail. Ce serait bien une petite tournée, non? Au sujet du remix «Cosmic Debris», c’est très planant avec des pistes comme «Raya Shaku» (j’aime beaucoup). Une fois encore du beau linge avec Jonathan Segel (Øresund Space Collective). Une saveur de progressif électronique à la You sur «Suspended Animation». Une douceur que j’apprécie beaucoup infuse dans «Get inside my Mind» (d’aucuns penseront aux dessins de Sergio Macedo pour Vic Voyage, très baba et écolo). Elle se poursuit dans «Dream within a Dream». Une production très positive avec «Night Rider» entre autres. Pour moi un bon disque de prog électronique. Et le talentueux Scott Heller d’OSC aux manettes (un gars adorable, comme Vince Cory d’ailleurs).
Fatalis Imperator
https://darksun.bandcamp.com/album/lords-of-space 

https://darksun.bandcamp.com/album/cosmic-debris

https://www.youtube.com/channel/UCETuf4Y6Zf6K9dMQnYmq8Vg

17/04/2022

Diablo Swing Orchestra
Swagger & Stroll Down the Rabbit Hole
avant garde – 60:47 – Suède ‘21
Le 18 octobre 2008, Diablo Swing Orchestra donnait, au Metal Female Voice Festival, un concert écourté, mais acclamé par le public, en raison de travaux routiers ayant gêné l’arrivée sur place de nombreux groupes.
Formé en 2003, revoici donc ces frappadingues avec leur cinquième et iconoclaste album qui débute sur des mélodies simples emplies d’espoir («Sightseeing in the Apocalypse»). «War Painted Valentine» déboule ensuite et mélange allégrement des ambiances que ne renierait pas Rammstein, le tout assorti de trompettes mariachi. D’ailleurs, «Celebremos lo Inevitable» nous confirme ces accords mexicains tout en douceur. Rassurez-vous, cela ne dure évidemment pas car très vite le ton se durcit au sein de même titre! Tiens, voilà Betty Boop qui se profile dans le chant de Kirstin Evegard sur «Speed Datin an Arsonist». Partons ensuite sur une sorte de folk moyenâgeux rehaussé de chœurs que Queen ne désavouerait pas pour un «Jig of the Century» entrecoupé de passages chers au Monthy Python. Skyclad n’est jamais très éloigné du titre «The Sound of an Unconditional Surrender». L’univers cartoonesque, cher à nos Suédois, fait son apparition pour «Malign Monologues» qui n’ont rien à voir avec ceux du vagin! Plus loin, «Les Invulnerables» calme le jeu, sans pour autant être un titre en français. «Overture to a Ceasefire» clôture cette splendide plaque comme une fanfare de dessins animés et ne peut que réjouir les auditeurs!
Pour ce type de groupe, j’ai déjà vu sur le terme de Nawak Metal et c’est bien de cela qu’il s’agit: absurde, du grand n’importe quoi mais justement n’oubliez pas l’adjectif grand. On peut rapprocher DSO (pour les intimes) de groupes comme les Stolen Babies ou, en France, de Pensées Nocturnes dont le nouvel album, «Douce Fange», vaut son pesant de cacahouètes!
N'hésitez pas un seul instant à vous plonger dans l’écoute de cette production.
Tibère
https://open.spotify.com/album/73YgGTPKJux9DVDr3Jv7k7

https://www.youtube.com/watch?v=JyfcbeLfYbI

18/04/2022

JPL
Sapiens Chapitre 3/3 : Actum
progressive rock – 45:08 – France ‘22
Revoici notre stakhanoviste en chef du rock progressif français qui clôt sa trilogie «Sapiens» en beauté avec un opus qui surpasse en inspiration et ferveur non seulement les deux albums précédents mais aussi, à mon humble avis, la discographie du Ponot [habitant du Puy-en-Velay, en Auvergne, ndlr]. Pour la faire simple, voici sûrement le meilleur disque de JPL (Jean-Pierre Louveton) à ce jour. Sous une pochette resplendissante de beauté et de couleurs qui n’est pas sans rappeler les plus belles œuvres de Roger Dean, voici un chapitre musical de la geste «louvetonienne» qui doit trôner sans tarder sur votre étagère de nouveautés. Maniant, comme à son habitude, un rock enfiévré et une propension à enjoliver progressivement chaque partition, notre homme est arrivé au point d’épure de la joie explosive et du contentement auditif. Fort de neuf titres dont cinq forment la suite «Memento Mori», cet «Actum» peut se targuer de rejoindre une caste réservée, celle des opus les plus réussis de l’art progressif français. La maturité permet de faire exploser le talent de composition et la manière de jouer. Fi de trop de compliments, je peine à trouver un quelconque défaut à ce troisième chapitre, les textes aussi proposent un dernier voyage un peu triste, désabusé et riche d’un joli vocabulaire qu’on est en droit d’attendre sur ce type de rock bien ciblé. D’un «Paradis perdu» qui n’a rien à voir avec celui du signore Bevilacqua à «Dansez maintenant», c’est une petite collection de chansons prog’ brillamment achalandées de guitares inspirées, de claviers rêveurs et de climats oniriques dont la gent progressive est particulièrement friande et c’est un vrai bonheur de découvrir qu’on peut encore faire, avec autant d’inspiration, un authentique rock progressif qui plonge ses racines au cœur des seventies tout en saupoudrant le tout de sonorités nouvelles, convoquant une saine agressivité au bon moment, au bon endroit… Je songe surtout à «Alias (La machine2)», illustration totale et complète de ce qu’est de nos jours un prog’ qui ne tient pas en place, alliant chanson et complexité musicale. Quant à la suite «Memento Mori», c’est bien entendu la clé de voûte de l’album, divisé en cinq morceaux; c’est une réussite absolue. «Marche vers l’inconnu» est un court instrumental savamment torché suivi de «Tempus Fugit», autre instrumental concis un poil plus court et joliment symphonique. Il est rare de faire suivre deux instrumentaux en ouverture d’une suite; JPL l’a osé et c’est réussi. Nos sens sont aiguisés pour la suite et on n’est pas déçu grâce à «La mort du roi». Ici pardonnez-moi si je vois du Décamps partout, une fugace et fulgurante pensée pour F. Décamps et ses défunts Gens de la Lune me vient à l’esprit. Textes pointus et mise en cascade de la musique pour accompagner ce titre des plus excitants. «Paria» s’ouvre sur une cascade pianistique s’étalant aussitôt dans une mare jazz-rock affolante de virtuosité; il y a du Atoll chez ce JPL là. Quand un disque prend ce type de virage inattendu, on prend vulgairement son pied, point barre! D’ailleurs, l’œuvre prend tout son sens à cet instant et «Acta Fabula Est» vient fermer la porte sur quelques arpèges de gratte sèche et une onirique partition grandiose et symphonique; le miracle est accompli, «Sapiens, Chapitre 3/3: Actum» devient une pierre angulaire du prog’ à la française par le volume et l’ampleur de son propos. Un album à écouter et réécouter jusqu’à satiété…
Commode

https://jplouveton.bandcamp.com/album/sapiens-chapitre-3-3-actum

https://www.youtube.com/watch?v=J4JoPT1qHJ4

19/04/2022

Gruppo Autonomo Suonatori
Omnia sunt communia
rock progressif italien (RPI) – 49:58 – Italie ‘21
GAS est un sextet créé en 1997 par Claudio Barone sur les bases d'un cover band de Le Orme; voici leur 1er album.
L'intro planante est très vite soutenue par un rythme plus ethnique pour une cohabitation de courte durée quand surgit le thème enlevé d’«Alice Springs», il est donc normal que ce soit sautillant. Mais il tourne insensiblement vers le jazz en gardant sa base pimpante. Appétissant!
«Il Sogno + La Regina»: du pur RPI, piano et nappes de cordes pour un thème un rien nostalgique, qui lentement se déploie. Puis une guitare sèche et un vibraphone annoncent l'arrivée du chant. Flûte et moog viennent égayer un peu plus encore la fête.
«Preludio» est un instrumental en 2 parties, la 1re aux intonations médiévales minimalistes avec bouzoukis et flûtes est une très belle étude. La 2de plus longue, tout aussi bucolique, est plus grandiose, et fait monter la tension, pour culminer sur une envolée de synthés rêveurs. Magique!
«Il Sacco di Bisanzio»: très narratif, avec un thème entêtant et des digressions de synthés jazzy sur percus et batterie, se présente comme la plus nerveuse de l'album avec sa fin ciné faite d'épées, de crépitements et d'explosions.
«Beatrice» est en 3 parties; l'intro instrumentale, très danse médiévale traversée de moog, nous prépare à une belle chanson, mais l'orgue qui s'invite change la nature et le niveau de la pièce qui s'étoffe pour une dernière partie absolument pétillante.
«Il Richiamo della Sirena» nous promène agréablement sur mille chemins sans que l'on sache quoi répondre à la sirène.
«Omnia Sunt Communia» vient superbement conclure en plus de 9 min, et là je dis non: toutes les choses ne sont pas communes car GAS a attendu 25 ans pour nous livrer ce florilège de leurs compositions. Et cela valait le coup de patienter!
C'est une belle illustration de la richesse du prog italien. Ils se produiront en concert lors du prochain ProgFest de Gênes le 16/7. J'y serai, et au premier rang (si le covirusse 22 veut bien nous lâcher)!
Cicero 3.14
Pas de lien Bandcamp ou Spotify.

https://www.youtube.com/watch?v=eMBNdqbvMSM

20/04/2022

Dave Bainbridge
To The Far Away
progressive folk – 71:24 – UK ‘21
Dave Bainbridge n’est pas un inconnu, très loin de là. Après avoir fondé et piloté Iona depuis la fin 1989 jusqu’à sa mise en sommeil en 2016, il a aussi rejoint les Strawbs en 2015 et surtout Lifesigns comme membre à part entière pour leur dernière merveille, «Altitude», parue l’an passé.
Avec «To the far away», il nous propose son quatrième album solo sur lequel il donne libre court à son grand talent sans les contraintes d’un groupe. À noter qu’il est ici accompagné par deux comparses de Iona; vous l’aurez compris, ici, point de RIO ou de zeuhl ni même de prog métal.
Cet album est particulièrement chatoyant: bien évidemment, les racines de sa musique puisent dans le folk et la musique celtique mais ces influences sont ici mises au service d’une œuvre qui se rapproche plus de Clannad ou de Mike Oldfield. La première plage, «Sea Gazer», porte magnifiquement son nom en nous accueillant sur un bruit de mer pour nous emmener vers une mélodie typiquement celtique mais richement arrangée; le tout tournant autour de la guitare de Bainbridge. La seconde prend déjà des tours nettement plus prog; ce «Girl and the Magical Sky» représente déjà un moment fort du haut de ses huit minutes très enlevées. L’instrumental «Rain and Sun» semble tout droit sorti d’un album d'Oldfield et le tout assaisonné à la mandoline du plus bel effet.
Un peu plus loin, ce sont les 14 minutes du majestueux «Ghost Lights» qui nous attendent et nous emportent dans des mélodies finement ciselées et tissées par la guitare. Citons encore «To gain the Ocean» et sa mélodie imparable faisant penser à Clannad, ou encore «Infinitude», réellement composé comme une musique de film; en fermant les yeux, on pourrait se croire au milieu de «Braveheart» ou de «Highlander».
Bref, vous l’aurez compris, cet album est vraiment à découvrir et se dévoile de plus en plus au fil des écoutes; l’étiquette «folk» serait vraiment trop réductrice tant la musique proposée ici sait se faire chatoyante et même parfois inattendue.
Un bien bel album donc.
Amelius
Pas de liens Bandcamp ou Spotify.

https://www.youtube.com/watch?v=Lm8l36tu_dQ

21/04/2022

Kryptograf
The Eldorado Spell
psychedelic doom – 45:22 – Norvège ‘21
«The Eldorado Spell» constitue le 2e album de Kryptograf. Le premier, éponyme, paru en 2020, ne nous était pas parvenu. Quatre individualités distinctes constituent le terreau de cette entité, à savoir Vegard Strand (guitare, chant), Odd Erlend Mikkelsen (guitare, chant), Eirik Arntsen (batterie, chant) et Eivind Standal Moen (basse). Ensemble, ils nous concoctent une musique intéressante, mélange improbable de rock à tendance psychédélique, d’un soupçon de space-rock, le tout entrecoupé d’influences progressives du meilleur aloi.
C’est avec «Asphodel» que débute cette plaque, sorte de desert rock déchiré de riffs de guitare lancinants. Plus loin, tendons la main au diable en personne («Lucifer’s Hand») sans toutefois quitter les effluves de la plage d’ouverture. «Across the Creek» nous propose plus loin une (courte) pause à la guitare acoustique, respiration bienvenue. Encore plus loin, «When the Witches» nous propose une rythmique rampante et terriblement sexy qui nous prend à la gorge.
En définitive, une belle production qu’il convient de découvrir afin de rêver aux paysages désertiques les plus éloignés de notre climat.
Tibère
https://kryptograf.bandcamp.com/album/the-eldorado-spell

https://www.youtube.com/watch?v=DqE55vxYbE8

22/04/2022

Steelyard
No Dimensions
atmospheric rock – 47:14 – Pays-Bas ‘21
Les Hollandais de Steelyard nous proposent en guise de premier album une compilation de leurs trois premiers EP sortis entre 2019 et 2020.
Le groupe nous propose un rock atmosphérique avec des éléments électro. Ce «No Dimensions» jouit d’une production exemplaire qui a pour avantage de magnifier les 10 titres qui le composent.
Un seul bémol… cette œuvre n’est disponible qu’en téléchargement.
L’ensemble et surtout la voix me font penser à Novastar.
Le voyage de 48 minutes auquel nous convie le groupe est mélancolique et oppressant. Le côté électro donne une ambiance «Lounge» qui contrebalance la noirceur que l’œuvre peut transmettre.
Rien n’est à jeter dans ce premier essai, chaque musicien y trouve un espace pour s’exprimer et le tout est servi par un chant juste et sobre.
Je ne trouve rien d’autre à vous écrire sur ce premier album sauf, pour une fois, vous laisser tenter par un téléchargement.
Vous ne le regretterez pas.
Tiro
https://steelyard.bandcamp.com/album/no-dimensions

https://www.youtube.com/watch?v=nIs3wt6NhEQ

23/04/2022

Years After
Years After
southern rock – 34:21 – Norvège ‘21
Il y a d’infinies façons d’aimer la musique, et celle qui sied à celle de Years After a quelque chose à voir avec la nostalgie, mais une nostalgie sans regret, plutôt une joie de vivre ancrée dans le passé, de celui qui se présente dans les larges rétroviseurs extérieurs d’un Dodge Ram empoussiéré, sur le plancher duquel les canettes de Miller vides se bousculent à chaque cahot, lancé à la vitesse sénatoriale de 30 miles à l’heure sur une piste de l’Arizona. Si les gars de Years After respirent, travaillent et jouent de la musique sur la côte Ouest, c’est sur celle de la Norvège (à Bergen), bien loin du climat qui a vu naître les Allman Brothers et autres Lynyrd Skynyrd – auxquels ils se réfèrent furieusement. Il y a d’infinies façons d’aimer la musique, et parfois j’aime celle qui n’invente rien mais sait s’abreuver à des sources choisies, celle que cinq jeunes musiciens (plutôt doués) intègrent, intériorisent au point de laisser agir leurs doigts (leurs pieds, leurs cordes vocales) et donner vie au plaisir de retrouver ce quelque chose qui, là encore, nous fait vibrer.
Auguste
https://yearsafter1.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=4twMof6IJbc

24/04/2022

Opensight - Mondo Fiction
Brutus

Opensight 

Mondo Fiction
heavy metal cinematographic-prog – 48:13 – UK ‘22
Opensight est un groupe de metal progressif colombien et anglais au style traditionnel, avec Ivan Amaya aux manettes; mélange de heavy prog à la Faith No More avec des touches cinématographiques alliant la lourdeur d’un riff à la qualité d’ambiance de films noirs aux nombreux rebondissements, de ceux d’espionnage anglais à ceux des thrillers et westerns italiens, faisant plonger dans un monde forclos d’où l’on ne revient pas; schizoïde-rock-heavy étourdissant avec ce 4e album.
Au niveau des 11 titres, à noter le son singulier avec un riff ravageur de base et des soli de guitare qui partent dans tous les sens. Au niveau ambiance, on part sur des traces d’ambiance de films, soit SF, horreur, thriller ou course poursuite, ça dépend de vos visionnages récents de films; perso j’ai noté «Matrix», «Kill Bill», «La Panthère Rose», «Inspecteur Gadget», «Delicatessen», «Mars Attack» et bien sûr le final d’un James Bond. La voix est très particulière, assez agressive et monolithique. Les deux interludes et les deux longs titres sont paradoxalement les meilleurs, m’évoquant la folie de The Darkness ainsi que Faith No More déjà cité plus haut. Les autres titres ont tous leur trame différente, cinématiquement parlant, mais la base musicale reste la même.
Le problème de cet album énergique des Opensight est bien l’étrange sensation d’avoir les titres qui tournent en boucle; c’est l’impression que j’ai eue lors de la première écoute sans voir les titres, assez dommageable de fait. Sinon, le bon côté est d’avoir vécu une expérience de métal alternatif excentrique bigarré où le progressif s’incruste lors des breaks spatiaux et étranges, un space rock movie théâtral en ce début d’année.
Brutus
https://opensight.bandcamp.com/album/mondo-fiction

https://www.youtube.com/channel/UCCRDiLBUXbqsqRSC8wHXCQQ

25/04/2022

Adventure
Tales of Belle, part 1. Across The Ocean
prog symphonique – 42:16 – Norvège ‘22
Adventure est un groupe fondé en 1995 à Trondheim, petite ville sur un fjord où sont posées de belles maisons aux façades colorées sur le bord de l’eau.
Le groupe propose un son vintage qui pourrait faire penser au groupe Uriah Heep, celui de l’époque avec David Byron et Ken Hensley, et croisé avec un peu de Deep Purple ou de Rainbow.
J’ai, pour ma part, découvert le groupe, devenu sextet, avec son 4e album «New Horizons» sorti en janvier 2019.
«All misfortune something is good», ainsi en est-il du confinement qui a permis au groupe de se consacrer à un 5e album. Ce dernier raconte l’histoire de Belle Gunness, originaire de Trondheim, qui, avec probablement une quarantaine d’assassinats à son actif, dont ses maris et enfants, est une tueuse en série de la fin du XIXe qui glace encore aujourd’hui les États-Unis où elle avait migré.
«Adventure», dans ce premier effort de 11 titres d’une duologie (qui comptera donc une deuxième partie, prévue au plus tard pour 2023), se penche sur la première période de la vie de Belle jusqu’à son arrivée à Chicago. Une «part 2» traitera de la sinistre suite jusqu’à sa disparition…
C’est un album, impeccablement interprété, qui enchantera les nostalgiques de hard rock symphonique des années 70, mélangeant consciencieusement les éléments prog et folk («Haunted Wedding», «Rumours Say»). La guitare et l’orgue Hammond soutiennent les belles performances vocales (féminine et masculine) s’appuyant sur une solide base rythmique. Ici pas de grand développements, ni grandes envolées. Les morceaux s’étendent de 1:35 à 5:13.
Et s’il fallait n’en écouter qu’un: «Voices»…
Publius Gallia
https://adventure1.bandcamp.com/releases

https://www.youtube.com/watch?v=28qVYdCCwVk

26/04/2022

The Ant Band
A Light on the Hill
progressive rock vintage/tribute – 52:12 – Allemagne ‘22
Un collectif de musiciens allemands membres de son fan club (Genesis News Com) a offert à Anthony Phillips, en décembre 2021 pour ses 70 ans, cet album tribute en cadeau d'anniversaire. Sympa, non? Et, en plus, ils le publient pour nous en faire profiter aussi!
Parmi ces 14 pistes, reprises de ses compositions, deux n'avaient jamais été publiées et cela aurait été bien dommage car il en ressort la même magie que celle ressentie en ...1977 lorsque j'ai écouté la première production solo de Ant. Pas de longues envolées, de soli ravageurs ni d'epic, ici, tout y est pastoral, léger, un brin médiéval, so british, plein des sonorités qui ont charmé alors, comme moi, de nombreux progsters devenus sexagénaires.
Cet album tout en douceur(s), fait la part belle aux guitares sèches 6 et 12 cordes, aux voix masculines et/ou féminines, aux synthés vintage. Un régal.
Parmi ces pistes, je distingue «F sharp», une version de travail de «Musical Box», co-signée par Rutherford et Ant. Malicieusement, c'est le successeur de Ant dans Genesis, Steve Hackett, qui a été convié pour éclairer d'un solo merveilleux cette prémisse du chef-d’œuvre de Genesis.
Un peu plus loin, le très beau «The salmon leap» sonne comme un bon Genesis 73-78, confirmant l'importance de Ant dans le style génésien. Ainsi sonne «Strange» parfum «Trespass».
«Slow dance» conclut l'album dans une ambiance nostalgique. C'est cela! Depuis le début de cette chronique, c'est le mot qui me manquait. Nostalgie.
La pochette est un aussi bel hommage d'Helmut Janisch à celle de Peter Cross, concepteur de celle du 1er album solo de Ant: «The Geese and The Ghost».
Une belle œuvre pour une bonne œuvre. Tous les profits seront reversés au «Corona Artists' Aid».
Cicero 3.14
https://antband.bandcamp.com/album/a-light-on-the-hill

https://www.youtube.com/watch?v=B7dAh3jmctM

27/04/2022

Gazpacho
Fireworking at St.Croix
crossover prog atmosphérique – 74:20 – Norvège ‘22
Gazpacho est le groupe fondé en 1996 s’apparentant à Marillion au départ, vite sensibilisé par Radiohead et ayant des accointances avec Coldplay; un groupe éclectique avec la voix mélancolique de Jan; un concept art rock lunatique intimiste. Ils nous livrent ici un set studio dans leur espace de St.Croix suite à un streaming inédit en 2020 en pleine pandémie; Gazpacho se pose toujours ses questions de lutte de l’homme avec sa force vitale.
«Space Cowboy» est le 1er des cinq titres de «Fireworker» entamant ce live unique avec la voix réverbérante à la Lana Del Rey, le violon électrique et les chœurs majestueux venant donner une sensation musicale bouleversante, l’accroche du départ planant, le final sur un Oldfield teinté de «Carmina Burana». «Hourglass» rappelle l’envoûtement du violon de Michael et son air plaintif, «Fireworker» sur la voix idyllique de Jon, dépressive, mélancolique et belle; Robert avec ses pads amenant une ambiance tribale sur sa batterie acoustique, magnifiée sur «Antique» où l’électronique vient en avant avec des boucles hypnotiques. «Sapien» vient conclure ce set avec un titre gothique intense, rempli de vagues musicales; le live devient indécent on a l’impression qu’ils ne jouent que pour nous; cette séquence avec voix off spatiale me donne encore les frissons; le piano à la Japan en rajoute, la guitare slide se pose sur un tempo aride, glacial.
«Substitute for Murder» pour le début du rappel, titre de «When Earth Lets Go» pour chauffer un peu avant d’attaquer les deux «The Walk Part I et II» avec le break oriental et «Winter Is Never» de l’album «Tick Tock» pour un final hymne à leur son unique.
Gazpacho s’est donc mis en scène à l’état brut se donnant sans correction, le flux élargi est remixé en 5.1, CD, Blu-ray, LP et DVD disponibles avec plus de 2 heures de bonus, de vidéos, une interview et un concert de 2019; un film concert issu d’une répétition, brut de décoffrage; une répétition bluffante, un concert studio pandémique unique, un album intense, onirique et majestueux tout simplement.
Brutus

https://kscopemusic.bandcamp.com/album/fireworking-at-st-croix

https://www.youtube.com/watch?v=7QUEgpkONCc

28/04/2022

D'Virgilio, Morse & Jennings
Troika
progressive rock/folk rock soft rock – 59:58 – USA ‘22
Inside Out Music
Et un nouveau supergroupe, un! Le stakhanoviste US du prog est de retour, j’ai nommé le sieur Neal Morse. Non content de sortir un album avec son NMB [The Neal Morse Band, ndlr], le voici déjà de retour avec une nouvelle production pour laquelle il s’est associé à son ancien comparse de Spock’s, Nick D’Virgilio, et Ross Jennings, le chanteur de Haken.
On aurait pu s’attendre à un festival prog de morceaux alambiqués et ici, les trois gaillards ont pris le chemin exactement opposé. Ne cherchez donc pas ici des compositions épiques de 25 minutes avec des changements de rythmes à n’en plus finir. Au contraire, on a vraiment l’impression qu’ils se sont installés tous les trois autour d’un feu de camp avec leur guitare acoustique; c’est ce qui frappe ici, c’est la prédominance des guitares sèches qui virevoltent dans tous les sens et constituent l’ossature de tous les morceaux.
Mais LE signe distinctif de cet album, ce sont évidemment les harmonies vocales; presque tous les morceaux sont chantés à trois à l’unisson avec des harmonies à donner le tournis. Les trois voix s’accordent magnifiquement et aucun ne fait de l’ombre à l’autre. Si nous voulions donner un point de comparaison, on pourrait penser à une version rock et vitaminée de Crosby, Stills & Nash. Les mélodies sont évidemment tirées au cordeau mais, avec Neal Morse dans l’aventure, il aurait difficilement pu en être autrement.
Et puis, le morceau à écouter absolument, c’est «King for a day» qui accélère le tempo, fait monter la température et nous ramène aux meilleures heures du Beard.
Bien sûr, cet album n’est en rien révolutionnaire et semble plus à prendre comme une récréation dans un parcours artistique chargé. Ce n’est certes pas l’album du siècle, ni même de l’année, mais cela fait du bien par où cela passe.
À consommer comme une friandise…
Amelius

https://open.spotify.com/album/7BpGWN9nTvPtNol95QrIu7

https://www.youtube.com/watch?v=I04cDyVbTbM

29/04/2022

The Far Cry
If Only
progressive rock – 66:48 – USA ‘21
Il est toujours difficile de juger un album et encore plus un premier enregistrement, tant les énergies, le travail et l’espoir d’un groupe sont grands. Et si les mots qui vont suivre n’hypothèquent en rien un futur que je souhaite radieux pour ce nouveau venu sur la scène progressive, il faut cependant dire une première chose: cet opus est beaucoup trop long. À mon avis, certains titres, comme «Programophone», par exemple, n’ont rien à faire dans un quelconque album; rarement il m’a été donné d’entendre un morceau aussi… pauvre.
D’autres, bien qu’acceptables («The Mask of Deception» ou «The Missing Floor»), n’auraient pas dû non plus être intégrés dans ce «If Only».
C’est paradoxal, car l’on frise la perfection avec «Dream Dancer» et «If Only» et surtout «Simple Pleasures».
Bref, si le groupe avait choisi de sortir ces trois derniers sous forme d’un EP, c’est une note d’excellence qu’il aurait reçu.
C’est dommage.
Tiro
https://thefarcry1.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=NlIG89pfXaM

30/04/2022

Breidablik
Alduorka
électro / ambient / BerlinSchool – 47:34 – Norvège ‘22
Sous les pilums, nos tentes. Arrogante Rome; folie des rois, tristesses des hommes!
Pour me consoler en cette nuit sordide, un sourire de mes contubernales et ce disque étrange qu’on me fit sur ce front parvenir. Play!
L’environnement est déterminant dans la façon dont les hommes s’expriment. Leurs langages transpirent la nature qui les étreint, leurs cultures sont imprégnées des éléments qui les bercent ou les tourmentent. Pour que se développe la technique du Yodel, il fallait l’écho des montagnes. De même, le Kulning avait besoin des plaines de l’Oural afin d’éclore.
S’il existe des peuples dont l’essence musicale semble bâtie sur les contrastes de leurs campagnes, ce sont bien ceux de Scandinavie. Quant à l’énergique vague qui s’apprête à vous caresser les lobbes, elle arrive tout droit de Norvège.
L’album, introduit par une sublime vingtaine de minutes contemplatives où bouillonnements électroniques se mêlent à de glaciales résonances, se vêt de désuétude lors d’un second titre «Orka I» durant lequel on déplore l’arrivée d’un solo de six cordes. Non qu’il soit mal exécuté, mais maladroit tant le climat déjà installé semblait solide, brut, inaltérable.
Qu’à cela ne tienne, nous revoici face à une mer calme, miroir d’un ciel étoilé, digne d’une plage tranquille d’El Jice. Placidité qui trouve sa continuité avec la piste suivante «Hraznō»…
Cependant que revient l’intrusive guitare, bien que moins dérangeante car davantage retenue, je réussis à rejoindre l'état en lequel m'avait plongé l’excellent incipit de cet ouvrage.
«Orka II» clôture l’affaire, tartiné du même goût «hors sujet» que son premier volet.
Sensation de galette dans la galette.
Opus inégal par sa tentative de concilier deux intentions, deux volontés différentes; un diptyque moyen qui déstabilise de magnifiques moments. Il me faudrait noter chaque partie séparément. Puis faire une moyenne. Mais peut-on jouer à cela lorsqu’un choix artistique a été posé?
Néron
https://breidablik.bandcamp.com/album/alduorka

https://www.youtube.com/watch?v=bph6cbiFrv0